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Comment vos connaissances en phytopathologie peuvent-elles vous aider dans la gestion de vos cultures et plantations ?

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Afin que les cultures que vous avez implantées puissent se développer et exprimer tout leur potentiel, il est important qu’elles soient en bonne santé.

Les préoccupations pour la préservation de l’environnement et de la biodiversité étant grandissantes, la lutte intégrée contre les ennemis des cultures, également désignée par le terme IPMpour « Integrated Pest Management », est obligatoire pour tous les professionnels. Elle promeut la combinaison des méthodes non chimiques de lutte avec un apport en produits phytopharmaceutiques (PPP) (méthode chimique) en dernier recours. Un traitement phytosanitaire aura donc lieu si nécessaire, au bon moment et à la bonne dose, si aucune des mesures alternatives n’a pu contrôler l’agent pathogène ou indésirable. Ces mesures sont issues de la Directive européenne 2009/128/CE qui a pour objectif de parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable. Le Programme Wallon de Réduction des Pesticides (PWRP) et le plan national NAPAN (Nationaal Actie Plan d’Action National) ont été mis en place en 2013 afin de répondre aux exigences de cette directive européenne au niveau wallon et belge.

Outre le fait de répondre aux objectifs du PWRP, la lutte intégrée peut avoir des avantages économiques pour les professionnels de l’agriculture et de l’horticulture, tel qu’éviter les coûts de traitements lorsque ceux-ci ne sont pas nécessaires., et augmenter la résilience des cultures sur le long terme.

Une lutte intégrée efficace se base sur 3 fondements primordiaux :

  • Prévenir/empêcher l’apparition des maladies ;
  • Surveiller les cultures et ;
  • Raisonner sa gestion.

Pour mettre en application ces 3 fondements, effectuer des visites au champ est essentiel. Avoir des notions de base en phytopathologie est un atout précieux qui permet de tirer un maximum d’informations de ces visites.

Découvrez dans cet article une introduction à la reconnaissance des maladies dans le but de valoriser les visites au champ et de construire un historique parcellaire sur le long terme, pour une meilleure gestion intégrée des cultures et plantations.

La phytopathologie c'est quoi ?

La phytopathologie est la science qui étudie les maladies (pathologie) des plantes (phyto). La manière de prévenir ou de guérir la maladie étant différente en fonction de la cause, il est important de savoir identifier cette dernière. La maladie peut être due à des organismes pathogènes tels que :

  • Les champignons (maladies fongiques ou cryptogamiques), capables de coloniser les cultures et plantations par le sol, l’eau, le vent, les végétaux, les résidus de végétaux et/ou le matériel de travail déjà infecté. Les champignons peuvent infecter leur hôte par pénétration directe, par les ouvertures naturelles (ex : stomates des feuilles) ou par les blessures existantes (ex : branches cassées). Leur croissance est généralement radiale (elle part d’un centre et s’étend de manière circulaire).
Clemson University - USDA Cooperative Extension Slide Series, Bugwood.org
  • Les bactéries, colonisant les cultures et plantations par l’eau, les végétaux, les insectes vecteurs, les résidus de végétaux ainsi que le matériel déjà infecté principalement. Les bactéries peuvent infecter leur hôte par les ouvertures naturelles (ex : stomates) ou par les blessures existantes.
Clemson University - USDA Cooperative Extension Slide Series
  • Les virus, se transmettant de plante en plante de manière mécanique, par contact entre plantes (à la suite de la manipulation de l’agriculteur par exemple) ou par des vecteurs (insectes, acariens, nématodes ou champignons) principalement. On compte parmi les vecteurs les plus communs : les pucerons, les cicadelles ou les thrips par exemple.
Phil Sloderbeck, Kansas State University, Bugwood.org

Attention, tous les organismes ne sont pas nuisibles pour les cultures et les plantations. Beaucoup sont même nécessaires ou bénéfiques pour celles-ci. Parmi eux, la bactérie Bacillus thuringiensis permettant de lutter contre la pyrale du buis par exemple, les rhizobactéries favorisant la croissance et la bonne santé des plantes, ou les champignons dits saprophytes, jouant un rôle très important dans la dégradation des matières organiques (ils représentent 90% des champignons existant, contre 10% pour les champignons pathogènes).

Les organismes auxiliaires également, parfois prédateurs naturels des ennemis des cultures et plantations : les coccinelles, les chrysopes et les syrphes par exemple, prédateurs des pucerons.


Identifier le pathogène

Pour identifier le pathogène responsable de l’apparition d’une maladie, il est utile d’observer la maladie à différents « niveaux » : le champ, la plante et le (ou les) organe(s) infecté(s) (feuillage, graines, boutons floraux, tubercules/racines, fruits, écorce…). Ces indices, une fois rassemblés, permettent d’identifier au mieux l’agent pathogène responsable de la maladie.

Au niveau du champ par exemple, une large zone circulaire de plantes touchées par une même maladie indique probablement un champignon ou parasite du sol tandis que plusieurs foyers dispersés indiquent plutôt un champignon dispersé par le vent.

Les symptômes observés sur les organes des plantes, bien que parfois généraux (flétrissement, pourriture…) peuvent aussi souvent donner des indices précieux sur l’agent pathogène en cause. Voici quelques exemples qui pourront vous aider dans vos futures identifications :


Symptôme : Exsudats/suintement

Cause probable : Bactérie

Exemple : Feu bactérien dans les vergers – Erwinia amylovora

La présence d’exsudats (suintements) jaunes ou blancs est typique d’une infection bactérienne comme le feu bactérien sur poiriers ou pommiers.

La présence d’Erwinia et de bactéries en général peut également, entre autres, mener à un flétrissement et/ou à un chancre (nécrose localisée de l’écorce). 



Symptôme : Poudre blanche ou grise

Cause probable : Champignon

Exemple : Oïdium/Mildiou

De la poudre blanche ou grise est souvent synonyme de la présence du mycélium de champignons, comme dans le cas de l’oïdium, une maladie pouvant s’attaquer à de nombreux végétaux dont les cultures légumières ; ou encore le mildiou, notamment en pomme de terre.



Symptôme : Points noirs et taches/pustules

Cause probable : Champignon

Exemple : Septoriose/Ramulariose/Rhizoctone/Rouilles

La poudre blanche peut s’accompagner de points noirs, correspondant à des cléistothèces chez les oïdiums, mais pouvant s’apparenter à d’autres structures fongiques qui apparaitront parfois au sein de tâches symptomatiques, comme dans le cas de la septoriose du blé ou de la ramulariose et la cercosporiose de la betterave Les structures fongiques peuvent également apparaitre sous forme de pustules, orangées, brunes ou jaunes sur la face inférieure des feuilles dans le cas des rouilles des céréales ou des fruitiers, ou brunes/noires sur les tubercules dans le cas du rhizoctone de la pomme de terre.

Les structures fongiques peuvent également apparaitre sous forme de pustules, orangées, brunes ou jaunes sur la face inférieure des feuilles dans le cas des rouilles des céréales ou des fruitiers, ou brunes/noires sur les tubercules dans le cas du rhizoctone de la pomme de terre.

Gerald Holmes, Strawberry Center, Cal Poly San Luis Obispo, Bugwood.org
William M. Brown Jr., Bugwood.org
Louisiana State University Ag Center, Bugwood.org


Symptôme : Poudre brune ou noire

Cause probable : Champignon

Exemple : Charbon du maïs La présence de poudre brune ou noire dans les graines est également souvent synonyme de la présence de champignons, produisant des spores (attention à la production éventuelle de mycotoxines). C’est le cas de la maladie du charbon du maïs et céréales, mais également de la carie en céréales ou de l’ergot du seigle par exemple.



Symptôme : Chlorose/jaunissement

Cause probable : Virus

Exemple : Virus sur pomme de terre De manière générale, les virusphytopathogènes causent un jaunissement (chlorose) des feuilles, pouvant prendre divers aspects : chlorose diffuse, chlorose en mosaïque, chlorose le long des nervures... Les déformations des feuilles (gauffrements, distorsions, etc.) ainsi que le nanisme des plantes touchées sont également symptomatiques des maladies virales.


Les nématodes, ennemis ou alliés ?

Les nématodes sont des petits vers ronds. Certains d’entre eux sont phytopathogènes, tandis que d’autres espèces permettent de lutter contre certains ennemis des cultures (taupins, thrips, limace…).


Symptôme : Galles/kystes

Cause probable : Nématodes

Exemple : Nématodes à kystes de la pomme de terre Parmi les symptômes visibles provoqués par les nématodes phytopathogènes, on notera la formation de kystes, d’abord blancs, puis jaune doré ou rouge-brun dans le cas du nématode à kystes en culture de pommes de terre par exemple.


Les maladies dues à des pathogènes sont à différencier des symptômes pouvant apparaitre sur les plantes en raison de la présence de ravageurs (ex : insectes).Ces derniers engendrent des dégâts mécaniques comme des piqûres (ex : pucerons) ou des morsures (ex : chenilles). Les ravageurs peuvent également être les vecteurs de maladies virales et bactériennes.

Les symptômes présentés jusqu’à maintenant doivent être différenciés de ceux dus à des causes abiotiques (action du non-vivant sur le vivant) comme :

  • Des carences en divers nutriments minéraux (magnésium, azote, etc.)
  • Des stress dus à l’environnement (stress hydrique, fortes pluies, dégâts de gel…)
  • L’application de PPP pouvant entrainer de la phytotoxicité suite à une mauvaise utilisation ou à de fortes chaleurs/sécheresses après la pulvérisation
Symptômes dus à une carence en azote vs. dus à un virus sur oignon - Ed Kurtz, Bugwood.org

Phytotoxicité d'un PPP sur pomme de terre - Ephytia

Comment vos connaissances en phytopathologie peuvent-elles vous aider dans la gestion de vos cultures et plantations ?

Les interactions

La phytopathologie s’intéresse à l’organisme pathogène responsable d’une maladie et à son interaction avec la plante qu’il infecte, mais pas uniquement. C’est en effet une science complexe qui s’intéresse aux interactions entre

  • la plante ;
  • son environnement ;
  • et les pathogènes qui y vivent.

Comprendre ces interactions est la clé d’une bonne gestion des maladies. Analyser pourquoi une maladie apparait et quels paramètres l’influencent permet donc d’adapter les solutions à mettre en place.

  • La plante :certaines maladies sont inféodées à une ou plusieurs espèces en particulier. La variété choisie peut également être plus ou moins sensible/résistante à une maladie. En fonction des risques de maladie liés à la région ou à l’historique parcellaire, il est important de choisir ses espèces et ses variétés en connaissance de cause.
    Par exemple, les pseudo-champignons Aphanomyces sont des pathogènes des Fabaceae. La culture de légumineuses sur plusieurs années favorisera donc le développement du pathogène. Les rotations sont par conséquent d’une grande importance, car elles permettent de « couper » le cycle reproductif de certains pathogènes.
  • L’environnement : les conditions environnementales (température, humidité de l’air/du sol, structure/composition du sol, repousses ou cultures avoisinantes…) peuvent être favorables ou défavorables au développement des maladies. Par exemple, un temps chaud et humide est favorable au développement des maladies fongiques.
  • Le pathogène : le pathogène est un organisme vivant et de ce fait, son développement est influencé par son environnement extérieur et les ressources à sa disposition. Certains variants d’un même pathogène peuvent être plus résistants aux différentes méthodes de lutte, et notamment à certains modes d’action des PPP. Aussi, certains variants seront plus ou moins agressifs et impacteront différemment les cultures. De nouvelles maladies peuvent également apparaitre/réapparaitre au fil du temps (changement climatique ou changement des méthodes de lutte par exemple).

Il est donc nécessaire de travailler au cas par cas en considérant le pathogène identifié, les conditions spécifiques de sa parcelle, le territoire sur lequel elle se trouve et les conditions climatiques, car les problématiques sont dynamiques.


La lutte en fonction des interactions : 4 axes

La présence d’un nuisible (pathogènes/ravageurs/adventices) au champ ne signifie pas nécessairement que des moyens de lutte doivent être immédiatement mis en place. Une certaine tolérance est acceptée pourvu que le seuil d’intervention ne soit pas dépassé.

L’observation « en temps réel » prend du temps et pour vous aider à identifier le seuil d’intervention de votre parcelle, de nombreux outils d’aide à la décision (OAD) sont disponibles en Wallonie, tels que les systèmes d’avertissement proposés par les centres pilotes et autres services agricoles par exemple.

Si un traitement phytosanitaire doit être effectué, les OAD permettent d’optimiser à l’échelle locale, le moment d’application ou le nombre de traitements. Ceci s’inscrit dans les principes de lutte intégrée, légiférée en Wallonie.

Ainsi, la lutte contre les maladies au champ s’organise autour de quatre grands axes :

  • Les mesures préventives/prophylactiques : pour répondre aux principes de la lutte intégrée, il est nécessaire d’agir de manière préventive face aux risques de maladies. Pour cela, travailler sur la biodiversité inter et intra spécifique, végétale et microbienne est essentiel. Dans ce but, les rotations des cultures et l’implantation de cultures associées jouent un rôle important, tout comme l’implantation de mesures favorisant les organismes auxiliaires, notamment les MAEC. Plus d’informations ici, sur le site de Natagriwal.
    Le choix conscientisé des espèces et variétés cultivées, notamment l’utilisation de variétés résistantes aux maladies, est le premier levier préventif en termes de pratiques culturales, mais de nombreux autres facteurs peuvent également s’inscrire dans cette démarche préventive :
    • La désinfection des outils ;
    • La taille permettant d'éviter un environnement confiné propice aux maladies ;
    • Les dates de semis ;
    • La qualité des semences ;
    • Le travail du sol (ou non) ;
    • ...
  • Les mesures mécaniques : en prévention, mais également lorsque la maladie est présente, des mesures mécaniques peuvent être prises afin de limiter sa propagation. Par exemple, pour le mildiou, la destruction des tas d’écart de tirage (tas de déchets) ainsi que l’élimination des repousses de pommes de terre dans les autres cultures est primordiale car elles sont responsables des premiers foyers d’infection dans les parcelles.
  • Le biocontrôle/lutte biologique : divers agents antagonistes/prédateurs aux ennemis des cultures sont sur le marché (ou font l’objet d’études scientifiques) dans le but de leur utilisation en tant qu’agent de biocontrôle. On trouve parmi eux les macro-organismes comme les coccinelles ou les parasitoïdes, mais également les micro-organismes comme Bacillus thuringiensis et certaines substances d’origine naturelle comme les phéromones (les deux derniers exemples étant considérés comme biopesticides, soit des PPP d’origine naturelle).
  • La lutte chimique : en dernier recours, l’utilisation de PPP d’origine synthétique pourra être envisagée. Les PPP « à faible risque » seront alors privilégier.

Retrouvez des fiches d’informations par culture et pathogène, afin de mettre en place des moyens de lutte en phase avec les principes de lutte intégrée.


Historique parcellaire et visites au champ

Afin d’organiser la lutte contre les ennemis des cultures en tenant compte des interactions et des différents leviers d’action cités ci-dessus, une vue complète de vos parcelles sur plusieurs années est nécessaire. En effet, pour prendre les meilleures décisions, une connaissance de l’historique parcellaire est indispensable. Pour créer et amender celui-ci, des visites au champ régulières sont primordiales. Elles permettront la détection des éventuelles maladies et populations d’adventices présentes.

Plus précisément, l’historique parcellaire permet de nourrir la réflexion à long terme quant aux futurs choix variétaux, à la rotation des cultures et aux raisonnements des mesures préventives ainsi que des méthodes de lutte tant mécaniques que chimiques (herbicides, fongicides, etc.).

A plus court terme, les visites au champ permettent d’initier les mesures pendant la culture, pendant la récolte et après celle-ci, mais également d’éviter des mesures qui ne seraient pas utiles comme une pulvérisation en dehors des situations de risque inacceptable.

La tenue des registres, qui permet de retracer l’historique de l’utilisation des PPP, s’inscrit dans cette démarche.


Une identification compliquée ?

Suite à une visite au champ, si vous éprouvez des difficultés à reconnaitre une maladie présente dans vos cultures, l’application web APPI.be développée par notre asbl peut vous aider à identifier la maladie sur base de vos observations. APPI est une base de données en ligne qui, en quelques clics, vous aide à reconnaître les maladies, les ravageurs et les adventices les plus importants des cultures.

Si l’identification du pathogène/ravageur s’avère trop complexe, l’équipe de la Clinique des plantes est également disponible pour réaliser un diagnostic personnalisé sur base d’échantillons.

Plus d’informations sur notre site corder.be/fr/clinique-des-plantes, par e-mail à l’adresse cliniquedesplantes@uclouvain.be ou par téléphone au 010 47 37 52.

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